« Eliane,
mettez-moi 500 choristes sur le Pont d'Aquitaine et faites-les chanter ! »
Le Conseiller à la Musique d'alors ignorait peut-être que la destinataire de
cette adresse lancée en Conseil d'Administration de l'association Aquitaine
Mission Voix aimait ce genre de défi ! L'idée germa dans un premier temps sous
la forme d'un grand rassemblement dans la cour du Palais Rohan le jour de la
fête de la Musique, avec distribution de partitions au public, apprentissage
sur place une heure avant le concert et réalisation commune de la très païenne
Première Nuit de Walpurgis de Mendelssohn ! Le succès de ce premier
« flashmob » musical amena à la création du Chœur Symphonique,
ensemble ouvert à tous, débutants ou non, prêts à absorber en huit dimanches et
une générale les grands ouvrages du répertoire peu donnés, voire oubliés tels
un « Mors » de Gounod attirant une telle foule au Palais des Sports
de Bordeaux que le capitaine des pompiers retardait le début du concert,
exigeant l'exclusion d'une centaine de spectateurs en mal de sièges !
Quelques années auparavant l'Ensemble Orchestral
d'Aquitaine avait été créé (devenu maintenant Orchestre Aquitaine-Hauts de
Garonne), structurant un groupe d'instrumentistes retrouvés régulièrement lors
de productions avec l'EVA ou le Madrigal et annonçant clairement la couleur
avec un premier concert à la Maison des Arts et des Loisirs de Floirac (rénovée
plus tard en M270) où l'on pouvait entendre le concerto « Dumbarton
Oaks » de Stravinski et la fameuse Symphonie Concertante de Mozart pour
violon et alto : l'objectif est toujours d'aller à la rencontre de tous les
publics, avertis ou pas, avec la plus grande exigence de qualité...
Bref, tous les ingrédients de l'aventure symphonique
étaient présents, permettant au public de belles émotions avec
« Marie-Madeleine » de Massenet, une mémorable « Enfance du
Christ » de Berlioz à convertir d'incurables mécréants (avis d'un auditeur
furieusement athée !), une « Création » de Haydn où l'on vit un
véritable serpent python de plus de deux mètres passer de soliste en soliste
pour finir sur une branche d'arbre au dessus du premier rang d'un public
hypnotisé. Depuis 1995, les productions se suivent avec le même engouement du
public et du chœur avec Dvorak, Liszt, Saint-Saens, la progression qualitative
des chanteurs amateurs permettant même la réalisation de l'himalayesque
« Missa Solemnis » de Beethoven où tout l'art pédagogique et le
charisme de notre héroïne était nécessaire pour emmener au sommet des choristes
qui ne s'en croyaient pas capables et dont le bonheur d'après-concert valait
bien celui de footballeurs de Division Honneur venant d'éliminer une équipe de
Première Division.
Ce qui frappe, à l'écoute des enregistrements de ces
concerts, c'est l'incroyable vitalité qui s'en dégage. Bien sûr, des
imperfections sont audibles ça et là, mais on est emporté dans le courant d'un
fleuve musical vital, regroupement de toutes les énergies positives de
personnes qui savent qu'au delà des clivages sociaux, professionnels et
politiques, il existe un terrain d'entente humaine profonde vers lequel
quelques rares personnes ont le don de nous emmener !
Le prochain concert Berlioz qui réunit tous ces
chœurs, dirigés par tous ces chefs élèves, disciples et amis, montre que le
semis a pris, des graines ont germé, ce don a été partagé, pour le plus grand
bien de tous !
Félix MENDELSSOHN extrait d'Elias
MONA RUSSEL
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